Maiwann

Tahiti - jour 17

Ça ne va pas.

Je le sens en me couchant, et encore plus en me levant, ça ne va pas.

J’ai peur.

Comme si j’étais aussi simple à casser qu’un cristal fêlé.

Comme si une parole, un geste, un mot, un regard, pouvaient me briser.

Je ne peux pas y aller.

Ce matin, c’était tour en bateau pour voir les raies et requins pointes noires, et le jardin de corail.

J’en ai envie.

Je ne peux pas y aller.

Je ne peux pas sortir.

Je ne peux pas les voir.

J’ai peur.

J’ai écrit à ma soeur sur Signal pour lui dire que je ne viendrai pas. Miracle de la discussion asynchrone, à l’écrit. Je n’ai besoin de voir personne.

Je sors pour aller aux toilettes comme si je faisais quelque chose de mal. J’en sors et en 3 pas je suis dans ma chambre. J’esquisse un “bonjour” pour répondre mais il n’a aucun sens. Je m’enfuie.

Ils partent.

J’en pleure de peine. Encore une demi-journée confisquée par ma santé. Elle est non négociable.

Ca ne va pas. J’essaie de me divertir mais rien n’est assez léger. J’arrive à relancer She-Ra pour m’occuper l’esprit. Il fait si chaud, il n’y a pas d’air. Je ne veux pas ouvrir la porte même si je suis seule. J’ai peur.

Je me suis endormie. J’ai si chaud. Je vais prendre une douche, la première depuis le voilier. Mes cheveux salés depuis 2 jours. L’eau qui me rafraichit. Je finis et je retourne dans la chambre. Juste à temps. Ils arrivent.

Ma soeur vient me voir pour savoir comment je vais. Je pleure. Je pleure. Je lui explique et je pleure à nouveau. Je suis intarrissable, un mélange de frayeur inarrêtable, de fatigue, de désespoir, de tristesse infinie, une tristesse qui a 20 ans, une tristesse qui vient de la partie enfant de moi qui n’en peux plus.

Je lui dis que je n’y arrive plus, je ne peux pas me forcer, je ne peux pas faire semblant, je suis à bout, je ne peux pas les voir. Je veux la voir elle, faire les trucs chouettes de polynésie avec elle, voir 1000 poissons et la voir rire et sourire, mais eux je ne peux pas. Je me sens injuste de lui demander de choisir. Injuste comme l’injustice d’un choix que je ne fais pas, celui de rester enfermée pour retrouver une respiration.

Elle comprend.

Elle repart, revient me donner de quoi manger. Des chips, des tomates, un morceau de pain, je ne mange que la moitié, ma psy m’avait prévenue, chez les personnes qui en souffrent les TCA sont le premier symptôme qui surgit quand la santé mentale déraille.

Il fait tellement chaud.

Elle prend en photo mon dos qui a subit un coup de soleil il y a 2 jours. On en rit, un peu.

Elle repart, j’essaie de dormir à nouveau. Elle m’apporte un ventilateur pour remplacer celui, si bruyant, qui se trouvait déjà dans ma chambre. Enfin de l’air.

Je l’allume, je relance les épisodes, et je me rendors.

Je me réveille. Je lis, un peu. Je lui ai dit qu’on sortirai ensemble, juste nous deux, en fin de journée. Je ne m’en sens même pas capable. J’annule. Je suis dégoutée.

Elle vient me parler de tout et de rien.

J’arrive à lire mes mails.

La journée se finit. Elle m’apporte une assiette. Je finis d’écrire cet article.

Je voudrais juste m’amuser. Demain, ils ne seront pas là.

Mardi on a des activités prévues ensemble.

J’espère que je vais pouvoir respirer.

Je suis tellement fatiguée.

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